« Pas de temps à perdre ! », a rappelé Yannick Bestaven (Maître CoQ V) la nuit dernière. De fait, pour lui comme pour une grande majorité des solitaires du groupe de tête, c’est en principe aujourd’hui à la mi-journée que la fameuse dépression dont on parle depuis plusieurs jours et qui devrait leur permettre de traverser l’Atlantique Sud de manière optimale est prévue de les attraper au vol. « A partir du moment où on se retrouvera calés dans son nord, on devrait faire une belle diagonale pour rejoindre les mers du Sud », s’est réjoui le tenant du titre qui pousse sa machine autant que possible depuis 48 heures, conscient que les premiers seront clairement les mieux servis sur ce coup-là. « Les écarts existants avec Charlie vont continuer d’augmenter », promet d’ailleurs le marin qui s’attend lui-même à faire le break sur une grande partie de la concurrence ces prochaines heures. De fait, une fois que lui et ses adversaires directs auront emboité le pas de cette zone fermée de basse pression atmosphérique, ils progresseront alors droit dans le pentu, au portant, avec le cap de Bonne Espérance dans le viseur.
Poignée dans le coin
« Depuis le passage de l’équateur, c’est très intense et très serré. On est plusieurs à se voir et on est tous dessus pour faire marcher au mieux nos bateaux. La mer est plutôt bien rangée donc ce n’est pas trop désagréable hormis la chaleur », a détaillé Yannick qui avance, comme les autres, à pas de géant. Pour preuve, ces dernières 24 heures, Charlie Dalin (MACIF Santé Prévoyance) a couvert plus de 523 milles. « Ce n’est pas facile de tenir la cadence, surtout pour moi qui suis positionnée un peu plus à l’Est car je pense que j’ai un peu moins de vent que les autres », a commenté Justine Mettraux (TeamWork – Team Snef) qui réalise néanmoins un formidable début de course et tient la dragée haute aux montures les plus récentes. « C’est chouette d’être un petit paquet de 10-12 à se tirer la bourre devant. On va tous essayer de faire une route assez nord avec cette dépression qui vient du Brésil et surtout de ne pas la lâcher », a relaté la Suissesse. « Si tout se passe comme prévu, ça promet d’être rapide sans pour autant être violent, ce qui pourrait nous permettre de revenir dans des timings un peu meilleurs par rapport aux temps de référence, ce qui ne serait pas mal », a commenté de son côté Yoann Richomme (ARKEA PAPREC) qui n’exclut pas, par ailleurs, d’améliorer encore le record des 24 heures en monocoque et en solitaire (551 milles).
Des perspectives intéressantes
« Quand je l’ai fait tomber, j’avais été assez lent au début, autour de 10 nœuds. Ensuite, sur 17 heures, j’avais tenu une moyenne de 25,5 nœuds. Je pense donc que l’on est capable d’approcher les 600 milles en une journée et ainsi de se rapprocher du record en équipage (648,48 milles réalisés par le team Holcim – PRB dans le cadre de The Ocean Race en mai 2023, ndlr) », prévient le navigateur. « L’angle de descente ne sera peut-être pas idéal cette fois. On verra. Ce qui est sûr, c’est que la gestion de la trajectoire va être intéressante ces prochains jours. C’est une bonne perspective ! ». Ça l’est effectivement pour ceux qui réussiront à profiter de la dépression. Ça l’est en revanche un peu moins pour les autres qui comprennent les conséquences que cela va avoir. « C’est dur parce que ça ferme une porte. On n’est pas à l’abri de recoller ensuite, bien évidemment, mais dans l’instant c’est dur pour les nerfs. Il ne faut donc pas trop y penser. La flotte s’est divisée en très peu de temps. Ça s’est vraiment joué à peu de chose. Je pense néanmoins que dans le groupe de devant, tout le monde ne va pas partir avec la dépression. On va en retrouver certains dans pas longtemps », a confié Alan Roura (Hublot). Premiers éléments de réponse dans la journée !