Oliver Heer : « c’est le début de quelque chose d’encore plus grand ! »
Ce lundi 17 février, Oliver Heer a bouclé son premier Vendée Globe, devenant le premier Suisse-allemand à réussir cet exploit. Après 99 jours de mer, il réalise un rêve d’enfant, lui qui admirait Dominique Wavre depuis sa chambre à Zurich. Son parcours n’aura pourtant pas été de tout repos. Bataillant contre les calmes, les tempêtes et les avaries, il a fait preuve d’une détermination sans faille. Rien ne l’a fait flancher, pas même la pétole terrible des derniers milles de son parcours. Animé par la passion et forgé par la résilience, il a su transformer un projet modeste en une aventure aboutie. Son bateau, loin des machines les plus modernes, a tenu le cap grâce à sa capacité à s’adapter et à ne jamais renoncer. Aujourd’hui, il touche enfin terre, fort d'une expérience inoubliable, le regard chargé des souvenirs d’un tour du monde gravé à jamais dans sa mémoire. Ses premières déclarations.

Vendée Globe :
Que ressens-tu après ce premier tour du monde et cette arrivée ?

Je suis à la fois heureux, excité et soulagé. Les derniers jours ont été particulièrement éprouvants : un vent violent de 45 à 50 nœuds au cap Finisterre, suivi d’un calme plat dans le golfe de Gascogne. J’avais l’impression que les Sables d’Olonne n’étaient qu’une illusion à l’horizon, et que je n’y arriverais jamais ! Mais maintenant, je suis là, et c’est une sensation incroyable, la plus belle des récompenses ! Je suis fatigué, mais mon cœur bat à tout rompre. Ces trois mois ont été intenses, et aujourd’hui, il n’y a rien de plus beau que d’être de retour pour célébrer cette aventure avec ma famille, mes amis et mes partenaires. Ce voyage a été long. 99 jours, c’est long… mais je suis là, en bonne forme, tout comme mon bateau. J’ai accompli ma mission. Mon objectif était de terminer la course proprement, de boucler ce tour du monde sans encombre. À chaque prise de risque, je me rappelais cette priorité et je tempérais mes ardeurs.
Vendée Globe :
As-tu atteint ton objectif sportivement ?
Je termine ce Vendée Globe à la 29e place. J’aurais aimé finir avec le groupe devant moi, au côté d’un marin comme Sébastien Marsset, qui avait un bateau similaire au mien. Mais cela n’enlève rien à la fierté et au bonheur que je ressens en cet instant. Aujourd’hui, je suis l’Homme le plus heureux du monde ! Je suis satisfait de ma course. Ma priorité numéro un était de terminer. Lors du premier tiers de la course, compte tenu des conditions, je me suis presque dit que le Vendée Globe était trop facile. Mais ensuite, l’océan Indien s’est révélé très intense, avec un enchaînement de dépressions et une houle constante. Puis, dans le Pacifique, j’ai vécu deux moments clés. Le premier, c’est lorsque je suis entré dans un anticyclone : un véritable tour sans vent où je suis resté planté pendant cinq jours. Naviguer dans 40 ou 50 nœuds est stressant, mais se retrouver sans un souffle d’air l’est tout autant. Le deuxième, c’est quand je me suis retrouvé tout proche d’un iceberg. J’avoue, ça m’a fait peur. C’est amusant de voir comment le Vendée Globe est rythmé en quatre grandes sections. Après l’océan Indien, j’ai cru que le plus dur était derrière moi. Une fois dans le Pacifique, j’étais convaincu que cette fois, c’était vraiment fini. Et pourtant, après avoir passé le cap Horn et retrouvé l’Atlantique, c’est là que j’ai finalement rencontré les conditions les plus exigeantes.
Vendée Globe :
Tu as été confronté à de nombreux obstacles avant même le départ de ce Vendée Globe : une collision lors de la Route du Rhum, un problème de gréement pendant la Transat Jacques Vabre… Penses-tu que ces épreuves t’ont rendu plus fort pour affronter cette course ?
Oui, ces épreuves ont renforcé mon équipe et moi. Ce n’était vraiment pas facile d’arriver jusqu’au Vendée Globe, mais cela a eu deux conséquences positives. D’abord, cela nous a obligés à améliorer la fiabilité du bateau. Ensuite, cela a prouvé à quel point nous étions déterminés à être au départ. Avec le recul, je ne changerais rien.
Vendée Globe :
Que retiendras-tu de ce tour du monde ?
C’est une question difficile à répondre. Ce que je peux dire, c’est que j’ai vécu des moments incroyablement forts, mais aussi des passages très compliqués. Je ne peux vraiment pas désigner un moment plus marquant qu’un autre, mais naviguer 23 000 milles sans s’arrêter, c’est la preuve qu’il y avait une vraie harmonie entre mon bateau et moi, malgré les petits problèmes rencontrés en route. Au regard du budget et du temps dont nous disposions pour nous préparer, je pense que nous avons réalisé une belle performance.
Vendée Globe :
Comment as-tu géré la solitude ?
Ça n’a jamais été un problème pour moi. Le mot 'solitude' a une connotation positive en français, mais en allemand, il est plutôt perçu négativement. En mer, j’étais heureux, je me sentais bien. J’avais aussi travaillé en amont de la course avec un préparateur mental, ce qui m’a beaucoup aidé à appréhender cet aspect.
Vendée Globe :
Penses-tu avoir changé à la suite de cette expérience ?
Donnez-moi une semaine ou deux, puis demandez à ma femme ! (Rires)
Vendée Globe :
Quid de la suite ?
Je viens tout juste de débarquer, donc c’est un peu tôt pour me prononcer. Mais une chose est sûre : j’ai vécu une expérience extrêmement positive sur ce Vendée Globe. Je pensais que terminer la course marquerait la fin d’un long projet, et finalement, j’ai le sentiment que c’est le début de quelque chose d’encore plus grand. Je serais très heureux d’être au départ en 2028 !