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Giancarlo Pedote : « Le Vendée Globe, une expérience qui permet de monter en puissance »

PAROLES DE SKIPPER (16/40) : Giancarlo Pedote n’aime rien de plus que de se surpasser, dépasser ses limites et aller au bout de lui-même. Il ne craint pas de réaliser de nouvelles expériences et encore moins de s’engager totalement dans l’action. Il le prouve au quotidien au travers de ses multiples activités parmi lesquelles l’apnée, la course à pied, la natation, le ski ou encore la boxe qu’il a pratiquée à haut-niveau avant de débuter la course au large avec succès en Mini 6.50 et en Ocean Fifty, puis de se lancer en IMOCA. Huitième de la dernière édition du Vendée Globe, 19 heures après le vainqueur, le skipper de Prysmian espère vivre aussi intensément que la première fois son tour du monde, mais aussi continuer de progresser. Ses atouts sont nombreux car l’homme, élu deux fois marins de l’année en Italie, est méthodique, rigoureux, acharné de travail et diablement compétiteur. Aussi, même si son bateau ne fait pas partie des plus rapides de la flotte malgré l’installation d’une nouvelle étrave et de foils, le Florentin compte bien, comme à son habitude, donner le meilleur de lui-même et, pourquoi pas, bousculer quelques favoris au passage.

LORIENT, FRANCE - 16 AVRIL 2024 : Le skipper de Prysmian, Giancarlo Pedote (ITA), le 16 avril 2024, au large de Lorient, France - Photo par Adrien Nivet / polaRYSE
LORIENT, FRANCE - 16 AVRIL 2024 : Le skipper de Prysmian, Giancarlo Pedote (ITA), le 16 avril 2024, au large de Lorient, France - Photo par Adrien Nivet / polaRYSE
© Adrien Nivet / polaRYSE

Vendée Globe :

Abordes-tu ce Vendée Globe très différemment de ton premier ?

Giancarlo Pedote

Giancarlo Pedote

PRYSMIAN

Chaque Vendée Globe est différent. J’aborde donc mon deuxième exactement comme le premier. Il ne faut surtout pas penser que parce qu’on en a déjà bouclé un, le suivant sera plus simple. J’ai presque envie de dire « au contraire ». Un tour du monde à la voile en solitaire, sans escale et sans assistance, est une épreuve très difficile. On ne peut pas savoir à l’avance quels systèmes météos on va rencontrer et encore moins la manière dont ça va se passer. Il faut approcher les choses avec vigilance et attention. 

Vendée Globe :

Quelles leçons as-tu néanmoins tiré de ta première expérience ?

J’ai pu constater que c’était une sacrée aventure. Que c’était une course dure et longue, avec une multitude de problématiques éparpillées tout au long du chemin. Le Vendée Globe est une épreuve lors de laquelle on apprend beaucoup de choses sur tout. Sur soi-même mais aussi sur la stratégie, sur les manœuvres, sur la manière d’appréhender les systèmes météos, sur la façon de se nourrir et de s’habiller… c’est une expérience complexe, mais une expérience qui permet de monter en puissance, et donc de progresser, dans tous les domaines. 

Vendée Globe :

On dit souvent qu’un tour du monde tel que celui-ci change un homme. Est-ce un Giancarlo très différent d’il y a quatre ans qui part cette année ?

Sûrement. Un Vendée Globe, c’est une expérience très forte, qui a forcément des conséquences et qui laisse même peut-être des séquelles, mais qui est très riche en termes d’apprentissage. La vie fait le même job mais dans un espace-temps différent. Partir en solitaire, avec des ressources limitées, met dans une certaine configuration. Si on est confronté à un souci, ce n’est pas comme en Formule 1. On ne peut pas faire un pit-stop, voir débarquer toute une équipe de mécanos puis repartir après quelques secondes, comme si de rien n’était. A bord de nos bateaux, on est forcément dans un fonctionnement différent. Il faut s’y habituer, savoir négocier, prendre du recul et prendre les bonnes décisions aux bons moments. Typiquement, en cas de problème technique, il faut être capable de savoir si c’est mieux de réparer tout de suite ou s’il est préférable d’attendre pour ne pas risquer d’aggraver la situation. C’est une somme de choses assez complexes. 

Vendée Globe :

Il y a quatre ans, tu avais véritablement semblé t’éclater en mer. On imagine que prendre autant de plaisir lors de cette 10e édition est aussi un objectif pour toi ?

Clairement ! Avant même de couper la ligne d’arrivée de mon premier Vendée Globe il y a quatre ans, je pensais déjà à mon deuxième. Je repars avec beaucoup d’envie. Cette course est quand même un truc extraordinaire. Le matin, lorsque je me lève, je me dis souvent que j’ai une chance inouïe de pouvoir y participer. Faire le tour de la terre avec un bateau, qui plus est en solitaire, c’est véritablement une expérience unique. Une expérience qui marque à jamais, qui reste à l’intérieur de soi pour toute la vie. Il faut donc en profiter au maximum.

Vendée Globe :

Tu as fait des études de philosophie. Est-ce important d’être philosophe lorsque l’ont fait le Vendée Globe ?

C’est difficile pour moi de répondre à cette question car je ne peux pas imaginer la manière dont ça se passe si on ne l’est pas ! (Rires) Je précise toutefois que ce n’est pas parce qu’on a étudié la philo que l’on est forcément philosophe ! Pour ma part, j’ai appris la quiétude. Certaines personnes ne sont pas capables de rester enfermées seules plus de cinq minutes dans une pièce. Lorsque l’on fait un Vendée Globe, mieux vaut que cela soit le cas ! (Rires) J’aime expérimenter de choses et le fait que je fasse ce type d’épreuve n’est pas un hasard. C’est une occasion que je m’offre de réflexion, de rencontre avec moi-même. Je n’enlève toutefois pas le tasseau le plus important : celui de la compétition. Je m’épanouis dans le sport. J’aime faire de bons résultats mais aussi, plus simplement, m’améliorer dans tous ce que je fais. Je fais en sorte de me servir de mes expériences précédentes pour m’améliorer dans toutes les activités que je pratique. Ce n’est pas quelque chose que je vis mal, tout au contraire. C’est vraiment de cette façon que je trouve les joies de la vie.

Vendée Globe :

Lors de ton précédent tour du monde, tu avais déjà pensé à la manière dont tu ferais évoluer ton bateau. Comment l’as-tu voulu ?

J’ai fait des choix radicaux que je ne regrette pas. L’étrave, que nous avons choisi de modifier, est aujourd’hui l’une des plus radicales de la flotte et j’y crois beaucoup. Je suis aussi très content d’avoir installé des foils. Cela m’a indiscutablement permis de gagner en performance même si ça reste évidemment compliqué de lutter avec les bateaux les plus récents. Certains choix ergonomiques, réalisés par Jean-Pierre Dick à l’époque, sont, de fait, intangibles. Un IMOCA, c’est un peu comme une maison : tu peux faire un « refit », tu peux changer certaines choses, mais à un moment donné tu ne peux pas non plus tout modifier car ça devient plus cher que de faire du neuf. Sur certains points, j’ai donc été obligé de faire des concessions et d’apprendre à faire avec.

Vendée Globe :

 Selon toi, qu’est-ce que fait ta force ?

Ma détermination et ma concentration. Je suis une personne capable de rester concentrée pendant 80 jours d’affilée, sans baisse de vigilance, surtout lors d’une course comme le Vendée Globe car c’est une course dans laquelle je suis engagé de la tête aux pieds, et jusqu’au bout des ongles. A titre d’exemple, je peux décider de ne pas faire une manœuvre mais certainement pas de la faire un peu n’importe comment.

Vendée Globe :

Que redoutes-tu le plus ?

Entendre ce grand « bang » synonyme de collision avec un truc flottant et à l’issue duquel la course peut se terminer d’un coup, en l’espace de quelques secondes seulement. C’est évidemment imprévisible puisque c’est lié au destin, mais c’est ce qui est, à mon sens, le plus dur sur une course telle que celle-ci.

Vendée Globe :

Quelle est la première image qui te vient en tête lorsque tu penses au Vendée Globe ?

C’est une image du Grand Sud, avec les albatros qui volent derrière le bateau et cet air froid qui donne l’impression d’être sur le télésiège ! (Rires)

Vendée Globe :

Ton plus beau souvenir de mer ?

C’est une question très compliquée. J’aime le moment où j’aperçois ma famille après une course. Les retrouvailles sont toujours très fortes en émotions. 

Vendée Globe :

Ton meilleur moment sur ce bateau ? 

Il n’existe pas de moment plus grisant à bord que lorsqu’il vole à 30 nœuds sur mer plate !

Vendée Globe :

Ton rêve le plus fou pour ce Vendée Globe ?

Un : passer un super moment avec moi-même. Deux : boucler le tour avec un résultat encore meilleur que celui de la dernière fois. 

Vendée Globe :

Ce que tu fais quand tu ne fais pas de bateau ?

Ce que j’aime au quotidien, c’est me dépenser. Je pratique la course à pied, la natation, le ski, l’apnée, le surf, le golf… en somme, toutes les bêtises de la planète ! (Rires)

Vendée Globe :

Ce qui ne te quitte pas lorsque tu es en mer ?

J’ai de très nombreux porte-bonheurs. Au total, j’en ai près d’une dizaine parmi lesquels des petits objets qui voyagent avec moi depuis mes années en Mini 6.50 et des choses que me confient mes enfants. 

 

Rencontre avec Giancarlo Pedote, Prysmian | Vendée Globe 2024

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