Parmi les nombreux défis que rencontrent les skippers du Vendée Globe, la gestion du sommeil est l'un des plus cruciaux, tant il est déterminant pour la sécurité et la performance. Dormir peu mais efficacement, rester lucide sans sombrer dans la fatigue extrême, connaître ses seuils d’épuisement pour mieux les maîtriser et éviter la zone rouge, réguler un cycle complètement désorganisé par l'intensité de la course... chaque marin doit trouver son propre équilibre, et surtout le rythme le plus adapté à son organisme
Un matelas « un peu comme un cercueil »
Car dormir sur un bateau en mouvement permanent, qui plus est sur des « foilers » de plus en plus rapides et bruyants, est une véritable discipline qui requiert de l’entraînement, du matériel adapté, et une excellente connaissance de soi. Des éléments que Damien Seguin (Groupe APICIL) a beaucoup travaillé en amont de son deuxième Vendée Globe, avec notamment « une vraie réflexion sur la manière de dormir à bord en sécurité ».
Lui qui explique avoir « la chance d’avoir toujours très bien dormi en mer » a en effet vu la différence en passant sur des bateaux à foils. Sur une transatlantique en 2023, il est à la bannette quand le bateau fait un planté, et est éjecté 2,5 m plus loin dans une cloison avec une belle frayeur et la sensation d’avoir « frôlé la correctionnelle ». « Pour ce Vendée Globe, il fallait impérativement que je puisse m’endormir sereinement et sans stress de finir comme ça », explique le marin handisport, qui a donc conçu « un cahier des charges très précis pour mon matelas, sur lequel j’ai travaillé avec la marque française de matelas André Renault. »
La forme est spécifiquement adaptée à la morphologie du marin, et creusée pour lui permettre une tenue sur le côté. « Un peu comme un cercueil », reconnaît en souriant Damien Seguin, qui pouvait aussi « se sangler au niveau des pectoraux ». Le matelas est en outre étanche sur la partie basse, pour lui permettre de garder bottes et cirés retroussés sur les chevilles, mais respirant sur la partie haute pour pouvoir « dormir facilement même quand il fait chaud ». Le prototype est complété par un oreiller spécifique pour « tenir la tête, parce qu’en atonie musculaire, tu peux vraiment te faire mal aux cervicales quand tu es projeté », avec une « housse polaire que je pouvais changer facilement pour l’odeur ». Petit plus de la maison : « les bords de ce coussin remontent sur les oreilles, pour atténuer le bruit, sans me couper complètement de ces informations précieuses sur le comportement du bateau ».
Résultat ? « Je pense avoir eu une bonne gestion de mon sommeil sur ma course, en tous cas j’avais toujours la confiance pour pouvoir me relâcher », explique le marin, qui dort toujours pour sa part sur « des créneaux de 40 minutes maximum ».