Gaston Morvan : « il y a un sacré niveau »
Il fait partie des nouveaux visages de la course au large. Champion de France de course au large, troisième de la dernière Solitaire du Figaro, Gaston Morvan s’active déjà pour participer au prochain Vendée Globe dans quatre ans. Fin régatier et marin de grand talent, il suit l’actuelle édition avec attention. Décryptage et analyse.
Vendée Globe :
Quel regard portes-tu sur la course du leader, Charlie Dalin (MACIF Santé Prévoyance) ?
Lors de la première partie de course, il était déjà très bon mais dans une forme de gestion. Depuis qu’il est dans les mers du Sud et surtout depuis quinze jours, il montre qu’il est le patron. Ses trajectoires sont limpides, sa vitesse est constante… Il fait une prestation de très haut niveau. Et il en laisse peu pour les autres !
Vendée Globe :
Derrière, Yoann Richomme a pris la deuxième place hier…
Il joue un peu différemment que Charlie mais il est aussi très intelligent dans ses choix. C’est son premier Vendée Globe, sa grande première en solitaire dans les mers du Sud et il s’en sort très bien. Ça lui a permis de revenir sur le leader et ça promet pour la suite. J’espère qu’on aura un bon duel, un beau match entre ces deux skippers qui se connaissent bien.
Vendée Globe :
On assiste à un regroupement derrière de Thomas Ruyant (VULNERABLE, 4e) à Clarisse Crémer (L’Occitane en Provence, 13e). Penses-tu qu'ils puissent ensuite revenir sur la tête de flotte la semaine prochaine ?
Oui, l’élastique va finir par se détendre à nouveau. Ce groupe va récupérer la dépression plus tôt que les autres. Ils vont devoir cravacher et se faire mal pour rester à l’avant du front qu’ils vont récupérer. Des skippers comme Jérémie Beyou (Charal), Nicolas Lunven (Holcim-PRB) ont très envie de revenir sur la tête de course. Il y a dans ce groupe beaucoup de skippers très talentueux, une sacrée densité de niveau et des bateaux un peu différents… Ça va être vraiment intéressant !
Vendée Globe :
Récemment, l’état de forme des skippers impressionne. Nicolas Lunven et Yannick Bestaven par exemple semblent assez reposés…
C’est intéressant, d’autant que ce n’était pas le cas il y a quelques jours. Ils ont pu souffler un peu après la dépression qu’ils ont eu. Dès que tu as des conditions clémentes, tu récupères plus vite, tu retrouves du confort mais aussi le sourire. Et c’est vrai que devant, les skippers ont l’air d’être encore frais.
Vendée Globe :
Il y a des groupes de skippers qui t’impressionnent plus que d’autres ?
Le groupe de Boris Herrmann (Malizia-Seaexplorer, 10e), Justine Mettraux (Teamwork-Team Snef, 11e), Samantha Davies (Initiatives Cœur, 12e) et Clarisse Crémer (L’Occitane en Provence, 13e) navigue très bien. Entre eux, c’est hyper serré et c’est là aussi un match très sympa à suivre.
Vendée Globe :
Un peu plus loin, le groupe mené par Jean Le Cam, Isabelle Joschke et Alan Roura a bien négocié le passage de la dépression cette semaine…
Oui, ils ont bien géré en prenant peu de risques dans la dépression, ce qui leur permet aussi de s’en sortir très bien par rapport aux autres. À l’image de Jean, ils ont fait les bons choix, ont bien maîtrisé leurs bateaux sans se faire mal dans le vent fort.
Vendée Globe :
Tu as la sensation qu’en termes de niveau, un palier a été franchi pendant cette édition ?
Oui, on voit qu’il n'y a pas eu de gros problèmes techniques sur les bateaux. En matière de vitesse moyenne, les concurrents vont très vite, même dans la mer formée. On ne voyait pas ça il y a quatre ans. Les bateaux ont beaucoup évolué en matière de technologie et d’architecture, les équipes ont eu le temps de bien se préparer, les skippers aussi.
Vendée Globe :
À titre personnel, tu souhaites à ton tour te lancer dans la grande aventure Vendée Globe ?
Oui, j’en suis encore aux balbutiements du projet. On réfléchit à sa structuration, on cherche des partenaires pour compléter le budget. Ce sont des projets conséquents à monter qui demandent beaucoup de préparation et de moyens. Le but, c’est de réussir à le lancer l’année prochaine et d’être au départ du Vendée Globe dans quatre ans. Idéalement, je cherche un foiler d’occasion pour jouer une belle place sur le prochain tour du monde.
Vendée Globe :
Comment tentes-tu de convaincre les entreprises ?
Ce qui est bien, c’est qu’il y a peu de choses à dire. Quand on parle du Vendée Globe, tout le monde connaît la course, des collaborateurs jouent à Virtual Regatta… Des centaines de milliers de personnes vivent la course de l’intérieur. Il faut réussir à leur faire comprendre que soutenir un tel projet, ça apporte un coup de projecteur beaucoup plus marquant qu’un spot télé, que c’est un support de communication exceptionnel. J’espère qu’on sera plusieurs à trouver des sponsors pour se lancer dans cette grande aventure !
Vendée Globe :
Comme Elodie Bonafous, tu as déjà fait tes preuves sportivement. C’est un réel atout pour se lancer ?
Oui, avec le Figaro, on a été à la bonne école ! Les trois skippers qui sont actuellement sur le podium de ce Vendée Globe ont soit un titre de champion de France, soit un titre à la Solitaire du Figaro (Charlie Dalin, champion de France 2014 et 2016, Yoann Richomme vainqueur de la Solitaire du Figaro en 2016 et en 2019, Sébastien Simon vainqueur de la Solitaire du Figaro 2018 ndlr). Ça veut dire qu’en ayant fait de bonnes performances en Figaro, on est légitime et on a le bagage technique pour évoluer en IMOCA. Ils ont réussi à le faire, alors pourquoi pas nous ?