Dans une course comme le Vendée Globe, les moments forts sont de différentes natures. Il y a bien sûr les exploits sportifs, les faits d’armes qui entrent illico dans les annales de la course au large, et seront rappelés au coin d’un feu de cheminée pendant de nombreux hivers - « Tu te souviens, cette journée où ils ont été six à battre le record des 24 heures ? – Oui oui, mais là faut remettre une bûche ! ».
Il y a les tours de force techniques, les réparations improbables, et les sourires de victoire de ces marins-bricoleurs, le visage encore teinté par la résine, marqué par l’effort, le vertige, la peur de ne pas y arriver. Ce fut par exemple celle de Louis Burton (Bureau Vallée), qui déjouait tous les pronostics avant de se faire rattraper par le sort au large de l’Afrique du Sud, malheureux mercenaire contraint d’abandonner cette course qu’il aime tant.
Et puis il y a les moments d’émotions pures, qui arrivent sans avertir, et accélèrent le palpitant comme s’il surfait sur une longue houle du Sud. Sur cette dixième édition du Vendée Globe, le passage de Bonne Espérance de Jingkun Xu (Singchain Team Haikou, 34e) en fait assurément partie. Déjà parce que sa joie, ses mots, ses larmes sont puissants. Ils disent tous les sacrifices pour en arriver là, tous les doutes pour le marin handisport au bras amputé et toute la fierté surtout d’avoir traversé ce premier océan. Et comme si ça ne suffisait pas, le skipper chinois y a ajouté un petit supplément d’âme, une attention qui rappelle que l’aventure est surtout belle parce qu’elle est tant partagée. Sur les réseaux sociaux, il a proposé à ceux qui suivent ses aventures de lui envoyer leurs vœux, pour qu’il puisse les lire au passage de Bonne Espérance et rendre ainsi au Cap tout son sens. Le voilà donc à se filmer, égrenant les souhaits d’illustres inconnus qui rêvent de diplômes réussis, d’enfants en bonne santé, de voyages, mais aussi de le voir terminer sa course. « Ce n’est pas des vœux pour vous, vous faites des vœux pour moi ! », rit-il ému, comme dépassé par ce soutien venu du monde entier.
« Mon bateau et moi arrivons à faire face »
Depuis, Jingkun Xu découvre l’Indien et ses violentes rafales à plus de 50 nœuds qui le laissent songeur sur son choix de voile. Sont-ce déjà ces innombrables vœux qui font effet ? Le voilà qui remonte au classement, lui qui a choisi une trajectoire Sud et nous explique :