Manuel Cousin : « une grande aventure, une histoire de vie »
Pour son arrivée, Manuel Cousin (Coup de Pouce, 31e) a eu le droit au soleil et à un ciel dégagé. Tout au long du chenal et jusqu’à la scène, il a pu goûter à une incroyable ferveur : le public avait répondu présent en nombre pour l’acclamer et vivre à ses côtés cet après-midi heureuse. Un instant de partage et de sourires, empreint de ferveur, sur les pontons aux côtés d'autres skippers, dont Benjamin Dutreux et Arnaud Boissières. Manuel est ensuite revenu sur son aventure avec beaucoup d'émotions. Propos d’un homme heureux après 111 jours sur l'océan.

Vendée Globe :
Qu’as-tu ressenti en remontant le chenal ?

C’est un truc de fou ! C’était presque une histoire sans fin mais vivre la remontée du chenal, ça vaut toutes les galères du monde. J’ai eu un accueil incroyable : je m’attendais à voir du monde mais pas autant. Je tiens vraiment à les remercier tous, certains viennent de loin, c’est juste dingue ! Un très grand merci aux gens qui ont suivi cette aventure !
Vendée Globe :
Comment résumes-tu ta course ?
Je suis parti pour une course et c’est devenu une grande aventure. Depuis le cap Horn, c’est un peu galère : j’ai quasiment fait que du près ! Je suis tellement heureux d’être arrivé, j’ai beaucoup de chance d’être là et j’ai une pensée pour tous les copains qui n’ont pas pu aller au bout.
Vendée Globe :
Ce tour du monde a été tout sauf reposant…
Pour moi, il y a vraiment eu un avant et un après le choc que j’ai eu avec un OANI (objet ou animal non identifié). Après c’était compliqué de repartir à la fois physiquement mais aussi mentalement, j’ai mis beaucoup de temps à m’en remettre. Il y a les petits bobos du skipper et les petits bobos du bateau aussi. C’était dur de retrouver de la vitesse et j’ai peut-être été trop conservateur parfois. Après, on a pu se bagarrer avec Fabrice (Amedeo, Nexans-Wewise), ce qui était chouette. On a pu se soutenir dans les moments durs. Mais cette arrivée aussi, ça vaut tout l’or du monde. On part pour le Vendée Globe et finalement on vit une histoire de vie, c’est complètement dingue !
Vendée Globe :
Ton aventure a duré 111 jours… Quel rapport as-tu eu avec le temps ?
En mer, on est dans un espace-temps complètement différent. Je ne vais pas dire que c’est passé vite mais je n’ai vraiment pas l’impression d’avoir fait 111 jours en mer ! Il y a des longueurs forcément et je n’ai pas été gâté depuis le cap Horn. Physiquement c’est dur et nos bateaux ne sont pas faits pour progresser autant au près. Mais l’être humain oublie vite les mauvais moments et ne fait que garder les bons. Et ça permet d’effacer toutes les galères !
Vendée Globe :
Tu as été pris dans une cellule orageuse particulièrement virulente… Comment l’as-tu vécu ?
Au Vendée Globe normalement, on maîtrise la force du vent, les conditions, on s’adapte en conséquence. Là, je ne me suis pas rendu compte sur le coup que la cellule était très importante. Elle faisait suite à un orage dans le sud de Madagascar. Ça a été 24 heures très durs mentalement, avec le vent, le tonnerre et l’impossibilité de sortir de cette zone. J’avais l’impression d’être dans un monde parallèle… On dit souvent qu’en cas d’orage il ne faut pas s’abriter sous un arbre. Moi mon arbre, c’est le mât et il fait 28 mètres de haut ! Je ne faisais pas le malin !
Vendée Globe :
Il y a eu de la fierté à porter les couleurs de Coup de Pouce (une association qui lutte contre le décrochage scolaire ndlr) ?
Si j’ai pu leur donner envie de suivre cette histoire, c’est génial. Il y a peut-être un gamin qui aura un déclic et qui voudra pousser les portes d’un club pour faire de l’Optimist. J’espère qu’on arrive à leur donner un petit peu de bonheur en plus. Ce tour du monde permet de faire parler de l’association et de créer d’autres club Coup de Pouce. Le but, c’est de contribuer à l’égalité des chances pour tous les enfants. Ce seront peut-être eux qui à l’avenir nous aideront à sortir par le haut du marasme que l’on vit.
Vendée Globe :
Est-ce que tu as pris du plaisir ?
Très honnêtement, il y a eu beaucoup de moments de galères. Un des moments extraordinaires que j’ai vécus, c’est le passage du cap Horn. Il y a quatre ans, je ne l’avais pas vu. Là, j’ai été gâté en le passant au soleil couchant dans du près léger. C’est comme si toutes les planètes s’alignaient !
Vendée Globe :
Est-ce que tu souhaites revenir dans quatre ans ?
Je viens d’arriver mais je sais qu’on dit « jamais deux sans trois ». L’aventure est belle, magnifique et je n’ai pas le droit de faire la fine bouche. Comme dans tous les sports, il faut avoir un peu de chance pour aller au bout. Sportivement, j’aurais aimé faire mieux. Et c’est vrai qu’on y prend goût. Je ne sais pas encore comment mais il faut que cette histoire perdure. Et j’ai envie d’y retourner !