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Les confidences de l’autre skipper belge du Vendée Globe

Alors que Denis Van Weynbergh s’apprête à boucler la boucle de son tour du monde, un Belge avait déjà tenté l’aventure précédemment. Patrick de Radiguès a en effet disputé deux Vendée Globe (1996-1997, 2000-2001) mais n’est jamais parvenu à aller au bout. Lors de sa première tentative, lui aussi était arrivé hors course. L’ancien skipper, habitué aux défis sportifs (il a participé aux 24 Heures du Mans et au Bol d’or), est désormais installé au Maroc où il « sillonne le désert plus que la mer ». Contacté ce vendredi matin, il a pris le temps de revenir sur ses souvenirs tout en portant un regard bienveillant sur l’aventure de Denis, seul participant de ce Vendée Globe à s’être élancé dans un projet 100% amateur.

Départ du Vendée Globe 2000
La flotte est illustrée lors du départ du Vendee Globe, tour du monde à la voile en solitaire sans escale et sans assistance, le 9 Novembre 2000, aux Sables d'Olonne
©  Jacques Vapillon / Alea

Vendée Globe :

Qu’avez-vous ressenti en suivant l’aventure de Denis Van Weynbergh ? 

Patrick de Radiguès

C'est super ce qu’il a fait ! Ce n’est jamais anodin de terminer un tour du monde en solitaire, sans escale et sans assistance. J’ai eu beaucoup d'appels ces derniers jours de journalistes à propos de la fermeture de la ligne. Mais ça fait partie du jeu et ce n’est pas l’essentiel. Ce qui compte, c’est l’exploit personnel d’être arrivé au bout. L’objectif de Denis était de prendre le départ, de faire son tour du monde et d’aller au bout. Et c’est exactement ce qu’il a réussi. 

Vendée Globe :

En 1997, après avoir abandonné suite à une escale en Nouvelle-Zélande, vous étiez également revenu aux Sables en étant hors course… 

Pas exactement ! C’est vrai que j’avais dû m’arrêter après avoir eu beaucoup de dégâts sur mon bateau suite à une tempête dans les Kerguelen. L’organisateur, Philippe Jeantot m’avait dit : il faut que tu viennes à l’arrivée pour déclarer ton abandon. Alors j’ai repris la mer et j’ai fait tout le tour. Je suis arrivé un mois après le premier. À l’arrivée, il y avait TF1, j’ai participé à un direct avec Patrick Poivre d’Arvor et Olivier de Kersauson. Et puis j’ai fait ma déclaration d’abandon. Finalement, même si tout ça est anecdotique, j’ai été classé pendant quelques heures (rires) ! 

Vendée Globe :

Vous souvenez-vous de vos émotions à l’arrivée ? 

Il y a beaucoup de sentiments contradictoires. D’un côté on est content d’arriver, de retrouver ses proches, d’en terminer, de bien manger. On attend de passer une nuit dans un bon lit mais c’est finalement trop confortable. Mais dans le même temps, tu sais que ta belle aventure est finie. D’un certain côté, tu n’as pas envie que ça se finisse. Tu as presque envie de faire demi-tour et de te mettre à écrire des livres dans le Pacifique (comme Bernard Moitessier ndlr). 

Vendée Globe :

Ce sont les émotions les plus fortes que vous avez ressenties parmi vos expériences sportives multiples ? 

Oui, j’ai participé aux 24 heures du Mans (automobile), au Bol d’Or (moto), à la Québec Saint-Malo (voile), j’ai fait du bobsleigh mais ce n’est pas comparable avec le Vendée Globe. Ça mérite vraiment son surnom d’ « Everest des mers ». Il y a quelque chose d’hors du commun et d’exceptionnel avec cette course.

Vendée Globe :

Et pour l’instant, aucun Belge n’a donc réussi à terminer classé !

J’aurais bien aimé qu’il y ait un Belge dans les délais ! Je pense que si nous n’avons été que deux Belges à participer, c’est plus une question de budget que de résultat. Moi j’avais eu de bons résultats, terminé 3e de la Transat Jacques Vabre mais je n’arrivais pas à trouver d’argent. J’ai dû vendre ma boite pour participer au Vendée Globe puis vendre mon bateau pour récupérer un peu de sous ensuite. C’est très difficile de trouver les fonds nécessaires en Belgique. Le fait que Denis ait réussi à avoir un budget, c’est déjà exceptionnel ! 

Vendée Globe :

Denis Van Weynbergh en IMOCA, Jonas Gerkens en Class40… Il y a une fierté à voir des Belges percer en course au large ? 

Oui, il y a en a de temps en temps ! Jonas est un très bon marin. Après, nous n’avons jamais eu les fonds pour faire de la voile au très haut niveau, pour participer à la Coupe de l’América par exemple. J’espère que ce qu’a fait Denis pourra donner espoir à d’autres bons marins de réussir à monter un budget pour participer à leur tour au Vendée Globe. 

Vendée Globe :

Quelle est l’image la plus forte qui vous reste de vos deux participations ? 

Je crois que s’il y avait une image, c’est le franchissement du cap Horn. Ça reste toujours un moment très fort, une bascule après la succession de tempêtes. On souffle, on rentre à la maison et « ça va le faire » comme on dit aux Sables d’Olonne. En 2000, ça avait été particulier avec la disparition de Gerry Roufs, les naufrages de Raphaël Dinelli et Pete Goss, les chavirages de Thierry Dubois et Tony Bullimore… Nos bateaux n’allaient pas vite, on flirtait constamment avec les 50es et on prenait beaucoup de risques. Alors forcément, quand on arrive à franchir le cap Horn après ça, le sentiment de délivrance est très fort. 

Vendée Globe :

Avec le temps, on finit par oublier les mauvais moments et ne garder que les bons de ses participations au Vendée Globe ? 

Ah non, je me souviens encore très bien des mauvais moments aussi… Je crois qu’on se souvient de tout ! C’est ce qui fait que le Vendée Globe est une expérience unique. Et que c’est une grande chance d’avoir pu la vivre. 

Patrick de Radiguès

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