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La chance sourit aux chanceux

Un coup pour toi, un coup pour moi. Dans un monde idéal, voilà comment ça se passe ! Si dans la flotte, à commencer par Yoann Richomme et Charlie Dalin, la distribution de cadeaux semble être souvent équitable, certains ont décidément l’impression d’avoir été oublié par le Père Noël…

25 DÉCEMBRE 2024 : Photo envoyée depuis le bateau STAND AS ONE - Altavia lors de la course à la voile du Vendée Globe le 25 décembre 2024. (Photo du skipper Eric Bellion) Le skipper de Freelance.com Guirec Soudée (FRA) en vue
25 DÉCEMBRE 2024 : Photo envoyée depuis le bateau STAND AS ONE - Altavia lors de la course à la voile du Vendée Globe le 25 décembre 2024. (Photo du skipper Eric Bellion) Le skipper de Freelance.com Guirec Soudée (FRA) en vue

Bien malheureux celui qui est né avec un appétit pour la compétition particulièrement aiguisé, parce que bien souvent, il aura beau faire un festin, il restera sur sa faim. Au lendemain « de l’apothéose, de la grande bouffe et des p’tits cadeaux », comme chantait Renaud, c’est un peu notre sentiment en regardant au petit matin la carto. 

Devant, c’est statu quo. Après un jour faste pour Yoann Richomme (PAPREC ARKÉA) qui avait creusé son avance - nous laissant songeurs à se demander presque « mais où est Charlie ? » - voilà que Dalin (MACIF Santé Prévoyance, 2e) a remis du charbon et pointe ce matin à moins de 15 milles du leader, à la faveur d’une baisse du ventilateur. Un partout, balle au centre anticyclonique, et on verra bien qui s’extirpera le premier des petits souffles, sans trop s’essouffler ! 

Plus au Sud, c’est pareil. Un gros coup de moins depuis la perte de son foil tribord, mais tout de même, un passage du Cap Horn en troisième position sans être trop inquiété par la concurrence pour Sébastien Simon (Groupe Dubreuil, 3e), qui n’aurait pas osé le demander sur sa liste avant le départ !

« pédale plus vite »

Par contre derrière, ça se corse, et n'y voyez pas là un hommage à l'île de beauté. Jérémie Beyou (Charal, 5e) a pris le temps pour nous de faire un peu de pédagogie topologico-sportive : 
 


Je ne sais pas si vu de terre vous arrivez à bien comprendre comment ces écarts se font ou se défont... J'ai déjà entendu des suiveurs me dire, « ben accélère » quand je me suis retrouvé derrière ! Ou comme en vélo « pédale plus vite »… C'est différent dans ce sport. Je vous promets que je pédale comme un dératé ! Et c'est pareil pour Nicolas Lunven à côté de moi. Mais c'est comme si on était tout le temps en côte quand tous les autres sont en descente... J'espère que vous arriverez à faire comprendre cela à ceux qui nous suivent à terre !

Jérémie Beyou
CHARAL

26 DÉCEMBRE 2024 : Photo envoyée depuis le bateau Charal lors de la course à la voile du Vendée Globe le 26 décembre 2024. (Photo du skipper Jérémie Beyou)
26 DÉCEMBRE 2024 : Photo envoyée depuis le bateau Charal lors de la course à la voile du Vendée Globe le 26 décembre 2024. (Photo du skipper Jérémie Beyou)

Le message est transmis, Jérémie, et la côte est interminable effectivement pour son petit groupe incluant aussi Thomas Ruyant (VULNERABLE, 4e), qui semble tout de même au dernier pointage avoir réussi à retrouver un peu de pente et d’allant...


Ceux de devant, tout le Pacifique ils ont fait très peu de manœuvres, et des grands tout droit. Derrière, le groupe de Boris aussi, ils ont fait un gros tout droit ! Et nous, depuis qu’on a pointé notre nez dans l’Indien, on a tout le temps une barrière devant, et chaque fois qu’on accélère on bute dedans. Donc c’est sûr que c’est pas une sensation très agréable d’avoir lâché 2000 milles aux mecs devant, et de voir revenir des gens que j’avais pas vu depuis l’Equateur, mentalement c’est pas facile à gérer ! Je pensais qu’on aurait des opportunités de revenir, on en a eu zéro... Vraiment un Grand Sud qui aura pas été sympa pour nous ! C’est la météo qui décide, mais est-ce qu’il y a une justice là-dedans, non pas vraiment !

Jérémie Beyou
CHARAL

Ah nous voilà replongés soudains dans nos cours de philo, et ce bon La Rochefoucauld qui nous rappelait que « l'amour de la justice n'est pour la plupart des hommes que la crainte de souffrir l'injustice ». Pas sûr que le frondeur prince de Marcillac était toutefois le plus assidu à la salle de sport et aurait goûté qu'on applique ses « Maximes » aussi prosaïquement !

Van Weynbergh au Cap Leeuwyn

Mais tous les lendemains ne déchantent pas dans la flotte. A commencer par celui de Denis Van Weynbergh (D’Ieteren Group, 36e), qui vient de franchir à 4 h et 36 secondes TU le Cap Leeuwin, deuxième marque symbolique de ce tour du monde sans escale et sans assistance. A l’ombre de l’Australie, il va pouvoir, comme ses camarades de fin de flotte devant lui, Fabrice Amédéo (Nexans – Weise, 35e) et Manuel Cousin (Coup de Pouce, 34e) profiter pleinement des derniers moments dans cet océan, avant de s’attaquer au prolifique Pacifique.

COURSE, 26 DÉCEMBRE 2024 : Photo envoyée depuis le bateau D'Ieteren Group lors de la course à la voile du Vendée Globe le 26 décembre 2024. (Photo du skipper Denis Van Weynbergh) Cap Leeuwin
COURSE, 26 DÉCEMBRE 2024 : Photo envoyée depuis le bateau D'Ieteren Group lors de la course à la voile du Vendée Globe le 26 décembre 2024. (Photo du skipper Denis Van Weynbergh) Cap Leeuwin

« C’est rigolo de se retrouver là »

S’il en est un autre qui n’a pas la gueule de bois, c’est bien Louis Duc (Fives Group – Lantana Environnement, 24e), propulsé au premier rang de son groupe, à la suite d’une compression de flotte dans les règles de l’art. Une situation atypique qui a permis aux compétiteurs de rendre à l’autre bout de la planète un petit hommage à leur coach lorientais :


L’autre jour avec Seb Marsset, on se disait « Tiens on dirait un entraînement avec Tanguy Le Glatin ! Toi tu te mets un peu sous le vent, toi t’arrêtes de faire l’imbécile, toi si tu sais pas barrer, tu mets le pilote » (rires) ! C’est rigolo de se retrouver là, dans la pétole, c’est assez sympa de régater un peu. On est tous éclopés, je crois qu’il nous manque tous au moins une voile, on fait tous avec ce qu’on a et on ne sait pas trop les armes des autres… Quand on voit les angles, on devine ce qu’ils peuvent et ne peuvent pas faire !

Louis Duc
Fives Group - Lantana Environnement

Il y a du monde dans le bourg, effectivement ! Entre Tanguy Le Turquais (Lazare, 23e), Sébastien Marsset (Foussier, 22e), mais aussi Benjamin Ferré (Monnoyeur – Duo For a Job, 21e), ou encore Violette Dorange (Devenir, 25e), tous se sont agglutinés « comme des chewing-gums », s’amuse Louis Duc, qui poursuit : 


De temps en temps, on a envie d’être peinard dans son coin pour pouvoir manœuvrer tranquille et à son rythme… A un moment avec Seb dans la pétole, je voulais affaler et bricoler, mais comme il était juste à côté à 300 mètres j’allais me faire dépasser, alors j’ai attendu qu’il n’y ait plus de vent du tout pour le faire ! C’est sympa mais faut pas que ce soit tout le temps comme ça non plus ! Quand on voit Richomme et Dalin qui passent le Horn en neuf minutes d’écart, tu te dis qu’il n’y a pas que nous ! Et je crois que c’est ce qui fait la magie de cette épreuve, pendant dix jours tu ne vois personne, et d’un coup t’es au contact, c’est cool, et au moins on voit qu’on n’est pas les seuls à avoir des emmerdes !

Louis Duc
Fives Group - Lantana Environnement

Après 45 jours de mer, se tenir là, en une poignée de milles, c’est une sorcellerie dont on ne se lasse effectivement pas, de notre côté de la cartographie non plus. Même si certains sont mieux servis que d’autres à la grande loterie de la vie, on sait au fond qu’ils n’échangeraient leur place pour rien au monde, car c’est se qui fait toute la beauté de ce sport aux mille rebondissements par seconde. 

LE 26 DÉCEMBRE 2024 : Photo envoyée depuis le bateau Lazare lors de la course à la voile du Vendée Globe le 26 décembre 2024. (Photo du skipper Tanguy Le Turquais)
LE 26 DÉCEMBRE 2024 : Photo envoyée depuis le bateau Lazare lors de la course à la voile du Vendée Globe le 26 décembre 2024. (Photo du skipper Tanguy Le Turquais)

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