En tête du Vendée Globe, Charlie Dalin (MACIF Santé Prévoyance) et Yoann Richomme (PAPREC ARKÉA) continuent leur duel serré, un véritable mano a mano qui ressemble plus à une partie de chat-perché nautique qu’à une simple course. Chaque fois que l’un croit avoir pris un peu d’avance, l’autre surgit comme un diable sorti de sa boîte. Ils naviguent tous les deux avec une précision mécanique, mais quand l’écart se resserre ou s’efface, leur sang-froid vacille. Et pour cause ! Imaginez : vous passez des jours à lutter contre les éléments, et votre rival, au lieu de se perdre dans l’horizon, décide de vous coller comme une mouette affamée derrière un bateau de pêche. « Ce qui est impressionnant, c’est la vitesse à laquelle on peut se faire prendre et reprendre des milles. On peut perdre 100 milles dans une journée puis en regagner 70 le lendemain. C’est un peu déphasant. Il faut rester assez calme dans sa tête, ce qui n’est pas toujours évident », a avoué Yoann. Pour lui, comme pour son rival, chaque avancée est une satisfaction fugace, chaque recul, une frustration mordante. Dans ce contexte, la psychologie devient un élément clé. Le but du jeu ? Ignorer la pression, et ne pas se laisser (trop) dévorer par l’incertitude. « J’admets que quand on a passé la dépression, Charlie s’est barré un peu et j’ai cru que j’allais rester coincé longtemps dedans. Je me suis un peu fait peur », a ajouté Yoann, faisant la preuve que même les meilleurs doutent parfois, ce qui est, finalement, presque rassurant. Parce qu’entre nous, qui peut prétendre prendre chaque décision comme un GPS sans jamais se tromper ?
Un pas vers les alizés
« Si je peux contenir un écart modéré, c’est une bonne chose. Ce serait bien de faire la transition dans l’anticyclone avec pas trop d’écart. Ça peut être top pour garder un peu de suspense pour l’arrivée mais je ne suis pas sûr que Charlie soit du même avis ! », a ajouté, non sans humour, le double vainqueur de la Solitaire du Figaro. Revenu à moins de trente milles de son rival, il a effectué un virement important ces dernières heures, et progresse désormais en direction du Nord. « Ça fait du bien d’être sorti du merdier dans lequel on était », a-t-il assuré. Ces derniers jours, tout comme le skipper de MACIF Santé Prévoyance, il s’est arraché les méninges à force de jongler avec des conditions météorologiques imprévisibles, où chaque décision semblait aussi aléatoire qu’un lancer de dé. Mais enfin, le décor change. Les vents se stabilisent peu à peu, offrant une accalmie bienvenue, presque un avant-goût des alizés. Pourtant, ce n’est qu’un prélude. Demain, ces vents réguliers tant attendus devraient enfin se renforcer, lui permettant de filer à bon rythme vers l’hémisphère Nord. Dans l’immédiat, il savoure ce répit, un peu comme un marathonien qui aperçoit le ravitaillement au loin : c’est encore loin d’être gagné, mais ça fait du bien au moral !
Spectacle sublime, menace silencieuse
Alors qu’il prévoit de franchir l’équateur d’ici trois ou quatre jours, profitant de la chaleur pour refaire le plein de vitamine D, ses concurrents en arrière connaissent une ambiance bien différente, notamment ceux évoluant entre le sud de la Nouvelle-Zélande et le mythique point Némo. Ces derniers doivent composer avec un adversaire imposant : les icebergs. Ces géants glacés surgissent sur leur route, semant la zizanie dans des esprits déjà tendus par des conditions polaires. Chaque mille parcouru devient un exercice de vigilance redoublée. « Impressionnants, majestueux, ils apportent une dose de magie à la course… mais aussi une bonne pincée de stress. Imaginer de voir un de ces géants givrés à l’horizon, c’est à la fois fascinant et un peu flippant. Parce que, soyons honnêtes, autant c’est beau de loin, autant on n’a pas vraiment envie de leur faire un câlin de trop près », a commenté Antoine Cornic par ailleurs surpris de devoir composer avec des conditions anticycloniques, ce qui ne l’emballe pas vraiment, lui qui s’était presque habitué aux secousses intenses du Grand Sud.
Redoubler de prudence
Pour Conrad Colman (MS Amlin), Sébastien Marsset (FOUSSIER) et Éric Bellion (Stand as One / Altavia), "de très près" n’est pas une expression exagérée. Leurs témoignages, partagés, oscillent ainsi entre le frisson et l’humour noir. Les autres marins, qui n’ont pas encore croisé ces sentinelles gelées, scrutent nerveusement leurs instruments, espérant que les modèles météo et les alertes de la Direction de course leur permettront de rester à une distance respectable.