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Coups de foudre en Atlantique

En ce 59e jour de mer, l’idylle entre Charlie Dalin (MACIF Santé Prévoyance, 1er) et Yoann Richomme (PAPREC ARKÉA, 2e) continue à vive allure dans les alizés. Boris Herrmann (Malizia Seaexplorer, 6e), lui, a connu un vrai coup de foudre qui s’est abattu à proximité de son bateau. Parmi les faits marquants du jour, il est question d’une belle remontée (Alan Roura, Hublot, 17e), de nouveaux cap-horniers, d’une dépression qui inquiète, d’un plongeon sous la coque (Guirec Soudée, Freelance.com, 24e) et d’un iceberg aperçu par Oliver Heer (Tut Gut.,30e). Dans le même temps, Benjamin Ferré (Monnoyeur - DUO for a JOB, 20e), toujours aussi inspiré, a livré une des plus belles déclarations d’amour à cette aventure hors-norme.

À bord de Singchain Team Haikou (Jingkun Xu)
© Jingkun Xu

Statu quo chez les leaders

Le duo de tête continue de filer à plein régime dans les alizés, un long bord qui doit le mener jusqu’à l’anticyclone des Açores. Il faudra attendre demain et le passage d’une dorsale pour que le vent faiblisse légèrement. La situation reste ainsi particulièrement avantageuse puisqu’ils seront bientôt poussés par un front puissant qui permettra « un passage limpide dans le Sud-Est des Açores », précise Basile Rochut, consultant météo du Vendée Globe. Les vitesses moyennes de Charlie Dalin (MACIF Santé Prévoyance) qui tutoie les 18 nœuds, lui permettent par ailleurs d’être légèrement plus rapide que son rival distant de 167 milles. Le Normand est aussi en avance sur les routages et pourrait franchir la ligne d’arrivée mardi prochain. Pourtant, il reste très concentré comme il l’a expliqué dans le Vendée Live ce midi :


L’alizé est parfois instable en force et en direction. Je suis à 20 nœuds là mais avant, j’ai eu une petite zone de vent faible. Je n’ai pas manœuvré depuis longtemps et il n’y a pas de changement de voile dans l’immédiat. J’en profite pour bien récupérer et être d’attaque avec la dorsale à négocier. Les températures commencent à baisser au fur et à mesure que je remonte vers le Nord. Pour l’instant, j’essaie de ne pas trop penser à l’arrivée parce que la course est encore longue.

Charlie Dalin
MACIF Santé Prévoyance

Mercredi 8 janvier | Vendée Live

Sébastien Simon (Groupe Dubreuil, 3e) remonte également en bénéficiant des alizés, lui qui fait une route plus à l’Ouest que les deux premiers. À la différence de Charlie et Yoann, il va devoir batailler pour bénéficier du front qui se forme à Terre-Neuve. « L’enjeu, ce sera de rester dans une zone de vent fort en bordure du front », précise Basile.

La ruée vers l’Ouest payante chez les poursuivants ?

Derrière, la bataille fait toujours rage pour le ‘top 10’. Les partisans d’une route plus Ouest, à proximité des côtes brésiliennes, menés par Jérémie Beyou (Charal, 4e) et Sam Goodchild (VULNERABLE, 5e) ont pris un léger avantage. Situés plus à l’Est, Paul Meilhat (Biotherm, 8e) et Nicolas Lunven (Holcim-PRB, 9e) ont commencé à faire route vers le Nord. Nicolas en a profité pour monter au mât et réussir quelques réparations précieuses. Pour eux, « ce n’est pas dit que le vent se maintienne, d’autant  que la zone est très perturbée », assure Basile. C’est ce que vit aussi Justine Mettraux (Teamwork – Team Snef, 10e), qui progresse à l’Ouest et qui reconnaît que rien n’est facile :


C’est très instable, très dur. Dès que tu retrouves du vent, la mer est mauvaise, le bateau tape fort, ça fait mal au cœur pour le bateau. Cet Atlantique Sud, c’est vraiment la punition ! Vivement qu’on en sorte et qu’on retrouve l’alizé de Sud-Est.

Justine Mettraux
Teamwork-Team Snef

Dans cette zone, il faut également composer avec les orages qui peuvent être très virulents. Hier, Sam Goodchild (VULNERABLE) s'inquiétait d’un orage particulièrement impressionnant qui le rattrapait. Des éclairs ont également frappé à deux reprises à proximité de Malizia – Seaexplorer. Ils ont engendré des dommages sur les systèmes électroniques et une sacrée frayeur à Boris Herrmann. « Ceux qui disent que la foudre ne frappe jamais deux fois au même endroit ont tort », raconte Boris. C’était l’une des journées les plus folles que j’ai jamais vécues en mer, une journée que je n’oublierai jamais ».
(Boris Herrmann victime de la foudre !)

Alan Roura, l’autre remontada

Le trio Benjamin Dutreux (Guyot Environnement – Water Family, 11e), Clarisse Crémer (L’Occitane en Provence, 12e) et Samantha Davies (Initiatives Cœur, 13e) devraient également être confrontés aux mêmes conditions de vents perturbés. Samantha semble prendre un léger avantage sur Clarisse en touchant un peu plus de vent d’une dépression qui se creuse sur leur passage.

Derrière, c’est Alan Roura (Hublot, 17e) qui est à la fête. En longeant la ZEA, le Suisse est parvenu à revenir à moins de 30 milles de Jean Le Cam (Tout Commence en Finistère – Armor Lux, 16e). Romain Attanasio (Fortinet Best Western, 14e) et Damien Seguin (Groupe APICIL,15e) progressent eux à l’Est pour remonter en même temps que l’anticyclone.

Face à la dépression

Cela fait plusieurs jours désormais qu’une partie de la flotte est accaparée par une forte dépression qui descend de la cordillère des Andes et va balayer le sud de l’Amérique du Sud. Comme à chaque fois, il y a les chanceux, dont Isabelle Joschke (MACSF, 18e), Giancarlo Pedote (Prysmian, 19e) et Benjamin Ferré (Monnoyeur - DUO for a JOB, 20e) qui devraient s’en sortir. Mais ce dernier assure qu’il ne faut pas traîner : « là, c’est courage fuyons ! C’est une course contre-la-montre pour s’en préserver au maximum ».  

Pour les autres, de Tanguy Le Turquais (Lazare, 21e) à Kojiro Shiraishi (DMG Mori Global One, 26e), il va falloir s’accrocher. Pendant le passage de la dépression de jeudi à vendredi, on attend des moyennes de vent de 35 à 40 nœuds, des rafales de 50 nœuds et des vagues qui pourraient atteindre les 6 mètres. La ZEA les empêchant de partir très à l’Est, ils devraient essayer de faire une route très Ouest.

Guirec Soudée, une plongée à 5°

Cette dépression concerne aussi Guirec Soudée (Freelance.com, 24e) qui a connu une sacrée péripétie. Alors que sa drisse de code 0 (une voile d’avant) a cédé, toute la voile est tombée à l’eau. Celle-ci flottait dans l’eau et Guirec n’avait plus le choix : il fallait plonger sous la coque. Une opération qu’il a réalisée dans une eau à 5° alors que « le bateau était incontrôlable et dérivait vers la côte » précise son équipe. Après être parvenu à ramener sa voile sur le pont, Guirec a reconnu être exténué. « Je n’ai plus de jus mais ça m’aurait rendu malade de laisser quoi que ce soit à l’océan », a-t-il confié. 

Derrière, Éric Bellion (Stand As One – Altavia) a, lui, savouré le fait d’avoir réussi ses réparations. « We’re back », a-t-il lâché en vidéo. Un peu plus loin, Oliver Heer (Tut Gut., 30e) a aperçu un iceberg sur sa route. « C’est un point de vigilance que nous avions dans la zone, souligne Jacques Caraës à la direction de course. Il s’agirait d’un iceberg d’environ 350 mètres de long, entre 10 à 15 mètres en hauteur ».

Le skipper suisse qui a dépassé le point Nemo fait désormais route vers le cap Horn. Hier, ils étaient sept à l’avoir franchi. Une émotion forte qu’avait vécu la veille Benjamin Ferré, onze ans après son premier cap Horn franchit à bord d’un petit voilier, en même temps que François Gabart sur le Vendée Globe. Ce matin, le skipper de Monnoyeur – DUO for a JOB a évoqué le cortège d’émotions que ça implique et livre une des plus belles déclarations d’amour au Vendée Globe. Morceaux choisis :
 


Petit à petit, c’est devenu ma réalité. Je suis incapable de dire depuis combien de temps on est parti mais je suis toujours aussi heureux de participer à ce Vendée Globe. On a beau nous avoir raconté tout ce qu’on veut, c’est hors-norme. Ce sont toutes les émotions de ma vie condensées en très peu de temps. Je l’ai encore plus ressenti au cap Horn. Dans la vie, soit tu pleures de joie, soit tu pleures de tristesse. Là, j’ai découvert qu’on pouvait pleurer de gratitude. J’ai eu envie de saluer tous les gens qui m’ont aidé, tous ceux qui me permettent de vivre ça.

Benjamin Ferré
MONNOYEUR - DUO FOR A JOB


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