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Antarctic monkeys

Alors que Charlie Dalin a fait cette nuit son entrée dans le Pacifique, tous nos marins s’alignent progressivement le long de la fameuse zone des glaces, pour serrer au maximum l’Antarctique et, n’en déplaisent aux « platistes » toujours en rogne contre Galilée, raccourcir drôlement leur drôle de route autour du monde.

COURSE, 13 DÉCEMBRE 2024 : Photo envoyée depuis le bateau HOLCIM - PRB lors de la course à la voile du Vendée Globe le 13 décembre 2024. (Photo du skipper Nicolas Lunven)
COURSE, 13 DÉCEMBRE 2024 : Photo envoyée depuis le bateau HOLCIM - PRB lors de la course à la voile du Vendée Globe le 13 décembre 2024. (Photo du skipper Nicolas Lunven)

Quelle meilleure manière d’entamer le week-end pour Charlie Dalin qui, en plus d’avoir de l’avance sur ses petits camarades, en a aussi sur nous ! Juste après sa petite grasse matinée, café et croissants à la bannette (laissez-nous rêver), celui qui est déjà au jour d’après est entré, à 23h45 TU – donc 10h45 vendredi en Tasmanie – dans le Pacifique. Un nouvel océan qui devrait s’accompagner d’un autre seuil symbolique d’ici quelques heures : celui de la mi-parcours ! Pour le skipper de MACIF Santé Prévoyance, en tête depuis près de dix jours maintenant, le retour à la maison va bientôt commencer… 

Derrière lui, les jolis jouets commencent doucement à se ranger. Après des jours et des jours à s’éparpiller autour des dépressions australes, voilà qu’ils viennent tous s’agglutiner progressivement le long de la ZEA (Zone d’exclusion Antarctique), avec plus de 2 200 milles d’écart (3 540 kilomètres) entre le leader et le dernier à avoir pris la route des glaces, Damien Seguin (Groupe APICIL, 17e). 

« Sur un bord, il me manque environ 30 % »

Car le Vendée Globe est une bonne manière de réviser sa géographie ! Et ce n’est pas Sébastien Simon (Groupe Dubreuil, 2e) qui pourra nous contredire, lui qui a pris « une douche froide » en réalisant que le Pacifique ne commençait pas au Cap Leeuwin et qu’il était toujours dans l’Indien ! « J’en ai assez vu de l’Indien ! », plaisante le skipper vendéen, pour qui les derniers jours ont été « ultra intenses comme depuis le départ » : 
 


Je vois bien que Yoann pousse fort derrière pour me rattraper coûte que coûte, moi je suis resté dans mon rythme, je le regarde faire, je fais ma trajectoire, ma course, c’est ce qui m’a permis de faire mon petit décalage dans l’Est et qui je pense sera bénéfique dans les 24 heures à venir. Il y a moyen de faire un petit break si on tient les routages, mais il y a quand même l’anticyclone qui arrive par derrière et j’ai peur qu’on soit un peu lents avec tous les empannages le long de la zone interdite !

Sébastien Simon
Groupe Dubreuil

Effectivement, l’heure est à la manœuvre ! Pour réduire la route au maximum et bénéficier du vent du Sud au maximum, nos solitaires viennent en effet se coller à la zone des glaces comme des mouches sur… euh, des moules sur un rocher ! Avec toujours un petit handicap pour Sébastien Simon, qui a perdu un foil voilà quelques jours, et nous raconte ce que ça fait de clopiner sous l’Australie : 


C’est sûr que le bateau est asymétrique maintenant, j’ai ajusté ma polaire pour les routages, donc sur un bord, il me manque environ 30 % du bateau. Après j’ai pas l’impression que ça change fondamentalement les trajectoires, ça me ralentit juste un peu en bâbord amure, ça se voit pas trop quand l’état de la mer est vraiment horrible, ça se verra plus quand le mer sera plus longue et où le foil permettra de prendre des surfs que moi je pourrais pas prendre ! En espérant que le Pacifique soit un peu plus tribord amure !

Sébastien Simon
Groupe Dubreuil

« Nos routages donnent le sourire »

Le Pacifique fait d'ailleurs déjà rêver Sébastien Simon, d’autant qu’il pourrait s’avérer rapide, et pas trop accompagné ! Une dorsale est en effet en cours de formation, et pourrait créer un beau passage à niveau sous la Tasmanie, qui viendrait recompacter la flotte. Certains routages voient ainsi Jérémie Beyou (Charal, 5e) franchir la Tasmanie une heure seulement devant Boris Herrmann (Malizia – Seaexplorer, 10e), actuellement encore à plus de 500 milles derrière le marin finistérien ! Il y a donc tout intérêt à cravacher pour essayer de déjouer les pronostics météorologiques, et ne pas s’éterniser dans la zone. D’autant que derrière, le scénario semble assez favorable selon Sébastien Simon, qui va attendre son prochain cadeau comme un enfant très très sage : 
 


Nos routages donnent le sourire, parce que ça nous ferait passer un Cap Horn autour du 26 si tout va bien, donc un peu en avance sur le temps d’Armel, et en plus ça ferait un joli cadeau de Noël ! Seulement dans 12 jours, ce serait assez incroyable de travers le Pacifique aussi vite qu’un Atlantique ! Voilà j’ai hâte maintenant de découvrir tout ça, j’aimerais bien avoir un peu de soleil et un peu de temps calme aussi, enfin pas trop calme hein, à bon entendeur, mais pour pouvoir sortir du cockpit un peu, prendre l’air, parce que ça fait quelques jours qu’on est enfermés là-dedans et ça ferait du bien de s’aérer un peu !

Sébastien Simon
Groupe Dubreuil

D’autant que l’épuisement commence tout de même à se faire sentir, reconnaît le marin, qui veut croire encore à sa « belle histoire sur un foil ». « Il y a toujours quelque chose à faire, j’arrive pas à prendre beaucoup de temps pour moi. Cet après-midi, je me suis endormi sans mon réveil, je sais pas, ou alors je l’ai pas entendu, ou alors je l’ai éteint. Mais c’est sûr qu’il y a un peu de fatigue, en tous cas le moral est bon, et tout ça c’est ce que j’étais venu chercher, donc je suis content ! »

Guirec aux Kerguelen 

La deuxième moitié de la flotte, elle, est toujours en plein match de catch avec l’Indien. Sauf Guirec Soudée (Freelance.com), qui approche des Kerguelen où il devrait un temps déposer les armes pour mieux réparer sa monture. Mais nul doute que ce petit singe qui s’apprête à grimper au mât va profiter aussi du spectacle de cette petite île déchiquetée de l’Antarctique, lui qui rêvait d’en découvrir les contours ! Il a prévenu la Direction de Course, s’il ne trouve pas de baie accueillante au Nord, il poursuivra à l’Est de l’île son exploration… Le contexte n’est pas le meilleur certes, mais il faut bien positiver !

Car quand on est encore aux prises avec les dépressions, et surtout la mer qu’elles engendrent derrière, chaque petite manière de s’évader est bonne à prendre. Pour l’heure, Fabrice Amedeo (Nexans – Wewise, 36e) vit bien ses premiers jours dans l’Indien, d’autant qu’il a pris une route Nord qu’il explique ainsi :
 


En arrivant à Bonne Espérance, j’ai pris pas mal de vent fort et je me suis rendu compte qu’avec mon bateau qui n’est pas très rapide et moi qui n’ai pas très envie d’attaquer et de prendre des risques, il vaut mieux naviguer à bonne vitesse dans 25-35 nœuds plutôt que plus au Sud dans des conditions dures même si on y fait moins de distance. Donc j’ai opté pour cette trajectoire safe, ma foi c’est assez atypique !

Fabrice Amedeo
Nexans-Wewise

COURSE, 13 DÉCEMBRE 2024 : Photo envoyée depuis le bateau GUYOT Environnement - Water Family lors de la course à la voile du Vendée Globe le 13 décembre 2024. (Photo du skipper Benjamin Dutreux)
COURSE, 13 DÉCEMBRE 2024 : Photo envoyée depuis le bateau GUYOT Environnement - Water Family lors de la course à la voile du Vendée Globe le 13 décembre 2024. (Photo du skipper Benjamin Dutreux)

Le navigateur peut en effet passer ses journées « en short » car « il fait assez chaud dans la cabine », tout en ayant le plaisir de voir « quand même des albatros par 37 degrés Sud, je pensais pas qu’il y en avait aussi haut ! » Alors il en profite de ce petit répit avant de retourner au front :


Une fois que je serai en Australie, ce sera un nouveau monde qui commence, parce qu’il y a un moment où il faudra quand même aller dans du vent soutenu pour aller le long de la ZEA et vers le Cap Horn !

Fabrice Amedeo
Nexans-Wewise

A lui comme aux autres, on lui a demandé si, malgré l’intensité du rythme de course, il avait vécu ces derniers jours quelque chose qui l’avait surpris, ému ou fait rire. Et c’est vers un autre marin que se sont tournées les pensées du Vannetais :


J’ai été touché par mon copain Romain Attanasio ! Sa compagne et lui attendent un petit garçon, j’ai trouvé ça assez mignon ! Et puis ça m’a fait sourire, je me suis dit qu’on était vraiment en 2024, il apprend ça en visio, met ça sur les réseaux. En 1989, Loick Peyron avait appris ça à la BLU, il était passé aux Kerguelen, et donc sa fille s’était appelée Marie-Kerguelen, c’était une autre époque !

Fabrice Amedeo
Nexans-Wewise

Bon, si besoin d'inspiration, Romain, on se tient prêts pour réfléchir à quelques prénoms. Pipo, c'est mignon non, pour te souvenir de ton interminable duel avec Pip Hare (Medallia, 16e) ? Ou Antarctico ? N'hésites pas en tous cas, on en a d'autres sous le coude ! 


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