Samantha Davies : « Je me suis éclatée »
Elle a réussi à résister à deux des dépressions les plus fortes de ce Vendée Globe au fil d’une dernière semaine à haute intensité. La veille de l’arrivée, la navigatrice d’Initiatives-Cœur, pourtant chevronnée, avouait ne jamais avoir passé autant de temps dans des conditions aussi extrêmes. Sam Davies a tenu bon, vaillamment, ce qui lui a permis de franchir la ligne d’arrivée ce jeudi. Exténuée par la bataille menée au large, Samantha a conservé son enthousiasme habituel en savourant son arrivée avec ses proches et le public venu en nombre. Extraits de ses premières réactions.
Vendée Globe :
Qu’est-ce que tu as ressenti à l’arrivée ?
Je crois que plus c’est dur, plus on apprécie à l’arrivée. Les joies de l’arrivée, je les attends depuis 2009. Je suis ravie de finir enfin le Vendée Globe. La fin était plus dure et plus longue que ce que j’avais prévu mais je sais que ça fait aussi partie du Vendée Globe. Jusqu’à la ligne d’arrivée, il faut tout donner… Ça reste une aventure incroyable !
Vendée Globe :
Si c’était à la hauteur humainement, comment tu l’as vécu sportivement ?
C’était frustrant et en matière de classement, j’aurais aimé faire mieux. J’ai eu quelques problèmes techniques à des mauvais moments, ça m’a fait rater certains systèmes. Le niveau est tellement élevé que tu ne peux pas faire d’erreurs. J’avais toujours l’impression d’essayer de rattraper ceux qui étaient devant. Et quand j’y arrivais, ça repartait par devant, il fallait s’activer à nouveau, recommencer…
Vendée Globe :
Quoi qu’il en soit, tu sembles heureuse…
Oui, je suis frustrée par le classement mais pas par la course. J’ai tout donné du début jusqu’à l’arrivée. J’étais dans un groupe avec Clarisse, Justine, Boris au début puis avec Benjamin à la fin et j’étais à fond tout le temps. Le bateau était incroyable. J’ai zéro regret. Il fallait quelqu’un qui termine dernier du groupe, cette fois c’est moi mais je me suis éclatée toute la course. Les frustrations sont vite oubliées !
Vendée Globe :
C’est donc la première fois que tu finis le Vendée Globe depuis ta première édition, en 2008.
Pour moi, c’est un rêve qui devient réalité. Ça faisait deux éditions que je n’allais pas au bout, alors je suis forcément hyper heureuse d’être là. C’est clair que ça a pris un peu plus de temps que je l’imaginais mais c’est comme ça.
Vendée Globe :
Comment as-tu vécu cette fin de course justement ?
Le problème, ce n’est pas que je ne pouvais pas franchir la ligne d’arrivée, c’est qu’il était impossible de m’abriter dans des conditions aussi difficiles. J’étais contente de retrouver Boris (Hermann) sur ma route ces derniers jours et d’affronter tout ça ensemble. On n’avait pas le choix, il fallait traverser ces dépressions. Après, j’avais confiance en mon bateau, il a été incroyable… Les vagues se creusaient et déferlaient : parfois, je me forçais à ne pas les regarder tant elles faisaient peur.
Vendée Globe :
Comment as-tu vécu ta traversée des mers du Sud ?
Partir aussi loin de toute terre, de toute civilisation, c’est toujours un test. C’est un test sur le mental, un test sur ta capacité à gérer la solitude et la répétition de l’effort. Mais je crois qu’on vient tous un peu chercher les sensations magiques du Grand Sud. Les baleines, les phoques, les oiseaux et puis le cap Horn… Vivre ça en étant au cœur d’une compétition, c’est génial. Il y a quatre ans, j’avais traversé les mers du Sud en étant hors course et j’en avais gardé un mauvais souvenir. Là, c’était trop bien !
Vendée Globe :
Peux-tu nous dire quelques mots sur la vie à bord ?
Si j’y pense en étant à terre, c’est l’horreur ce que l’on vit. Parfois, il faut réfléchir plusieurs jours à l'avance à ce dont on va avoir besoin dans un sac qui se trouve à l’avant du bateau, parce que l’on sait que ce ne sera plus possible d’y accéder pour les trois jours à venir. Les déplacements peuvent être dangereux. Avant le départ, j'étais un peu inquiète de savoir si j’allais réussir à vivre comme ça pendant deux mois et demi, mais finalement, les bateaux sont tellement incroyables ! Je n’ai pas souffert de ça, de ce mode de vie un peu rude : ça passait sans problème. Je pense que c’est ça, le dépassement de soi : en mer, on se découvre capable de choses qu’on n’aurait jamais imaginées. C’est une source de satisfaction immense… et quelque part, c’est un peu la drogue du Vendée Globe !
Vendée Globe :
Ce tour du monde t’a permis aussi de continuer ton opération de mécénat pour récolter des fonds afin d’hospitaliser des enfants malades…
Avant de partir, l’objectif était de passer trois caps : le cap de Bonne Espérance, le cap Leeuwin, le cap Horn mais aussi le cap des 500 enfants sauvés. C’est l’objectif qui était fixé au début du projet Initiatives-Coeur, d’abord avec Tanguy de Lamotte puis avec moi. Nos partenaires versent de l’argent à chaque clic sur notre site et nos réseaux sociaux. Ce n’est donc pas grâce à moi mais grâce à vous, grâce au public, si nous pouvons aider ces enfants. Et je vous remercie tous du fond du cœur !