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Antoine Cornic, une certaine idée de l’aventure

À 42 ans, ancré à l’île de Ré où il tient un restaurant, Antoine Cornic, né les pieds dans l’eau, a toujours rêvé du large et des petits bonheurs qu’il procure. Fils de régatier, « pote » de Yannick Bestaven, il a fait ses classes sur la Mini-Transat avant de lancer son « projet fou » : faire partie de l’aventure Vendée Globe en 2024.

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À La Rochelle, il y a toujours un petit air de Vendée Globe, même à près de 100 km au sud des Sables-d’Olonne. Parce que Maître CoQ IV est là et que les chanceux peuvent apercevoir le vainqueur de la dernière édition, Yannick Bestaven. Parce qu’il y a eu, aussi, Compagnie du lit-Jiliti, le bateau de Clément Giraud. Et à leur côté, un autre IMOCA, Spirit of Canada, un tour du monde avorté en 2008 avec Derek Hatfield et un nouveau projet pour repartir. Le bateau a connu plusieurs vies et ça tombe bien : le parcours de son actuel propriétaire, Antoine Cornic, n’a rien de linéaire.

« J’ai navigué avant même de marcher »

Antoine Cornic a 42 ans, il en aura trois de plus lors du prochain départ. Dans sa vie, depuis le début, les embruns n’ont jamais été loin. Lui s’en amuse : « J’ai navigué avant même de marcher ». Et le Rétais – du nom de ceux qui vivent à l’île de Ré toute l’année – de dérouler le fil de son existence : son père qui était dans l’équipe de France de 470 au cœur des années 1970, la rencontre entre ses parents « sur l’eau en Normandie », l’enfance avec son frère de trois ans son cadet, mordu de voile comme lui, et les études qui se sont « plus ou moins bien passées ». Ses parents aimaient la régate, Antoine vibre pour le large. « C’est là que je m’amuse le plus. Je ne suis pas fan des départs et des arrivées, mais j’aime la solitude en mer, le fait de ne voir que l’océan autour de soi… » Il aime les navigations « VHF éteinte », lit et relit Bernard Moitessier et se fait progressivement une idée de ce que peut être l’aventure.

En 2001, il se lance sur la Mini-Transat. Sur la coque de son 6,50 m, une inscription, le nom du projet : « Une course de rêve pour un rêve de gosse ». Le sien aura pris corps grâce à l’argent du paternel qu’Antoine s’est chargé de rembourser. La course prend la destination du Brésil pour la 1re fois, Antoine termine 10e et le vainqueur s’appelle Yannick Bestaven ; il est devenu au fil des années « un bon pote ». Arnaud Boissières et Karen Leibovici étaient là aussi. Ils bifurqueront rapidement vers le Vendée Globe. Antoine avait déjà cette envie-là, au point d’acquérir un 50 pieds pour y participer en 2004. Mais le projet n’ira pas au bout après une succession moins heureuse : une tentative de record de l’Atlantique nord ratée, la perte du sponsor… « Ma descente aux enfers », dit-il. La lassitude pointe quand on doit se battre sans relâche pour trouver des financements – « Ce qu’il y a de plus dur dans la course au large », dixit Antoine – et que le sort s’acharne.

L’appel du large, « c’était obsessionnel »

Alors, il décide de « revenir à ses premiers amours » et monte un bistrot « comme en Bretagne » à l’île de Ré. Il rencontre sa femme, fonde une famille (deux enfants), monte un second restaurant, construit une maison… La vie au bord de l’eau. Mais l’appel du large est toujours là, - « c’était obsessionnel » - au point de participer à nouveau à la Mini-Transat en 2017 (11e). Ensuite, Antoine arrive à la croisée des chemins. Il revend un restaurant et un dilemme se pose : « Soit j’achetais un bateau pour qu’on navigue en famille, soit on essayait d’aller au Vendée Globe. » Le projet est fou, mais son sponsor, EBAC (une marque de literie) y croit, ses proches aussi.

Il rachète à l’Australien Jack Bouttell, vainqueur de la Volvo Ocean Race 2000, Spirit of Canada. « Mon frère est allé voir le bateau à Lorient. Il était bien construit, solide, même si on savait qu’il y avait un gros travail de rénovation à faire ». L’IMOCA est emmené à La Rochelle et la grande aventure commence. C’est le temps du chantier, des journées à rallonge, des coups de main des copains, des « gueules dans la poussière », de l’envie d’avancer, des doutes qui rongent, du budget à maîtriser, de la confiance à conserver malgré un démâtage l’an dernier, du soutien sans faille et si précieux de sa femme et de ses enfants « sans qui rien n’aurait été possible ». Ces batailles invisibles dessinent le début de son aventure et donnent corps à l’idée de participer à cette course incomparable.  « Il y a moins de personnes qui ont fait le Vendée Globe que de personnes qui sont allées dans l’espace. C’est une aventure d’extraterrestres. »

La sienne se poursuit avec la Transat Jacques Vabre en ligne de mire. Le contre-la-montre est lancé : premières navigations dès la semaine prochaine, sortie en « faux solo » au bout de quinze jours, qualification pour la transatlantique avec l’envie de faire une longue boucle jusqu’aux Açores, mise en chantier et convoyage jusqu’au Havre. Le coskipper est son boat captain, Jean-Charles Luro, qui compte déjà 9 projets en IMOCA. Et ils ont hâte d’en découdre, de goûter à la fièvre du large et de continuer à rêver en grand jusqu’au plus prestigieux des tours du monde.

La rédaction du Vendée Globe / Antoine Grenapin


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